Après qu’Emmanuel Macron ait annoncé la fin de l’opération Barkhane le 9 Novembre 2022 et le renvoi de ses troupes présentes au Mali, c’est au tour du Burkina Faso de demander le retrait des troupes français de son territoire.
Comment expliquer le revirement de situation que subit la France dans la région du Sahel ?
L’opération Barkhane lancé en 2014 mobilisant quelques milliers de soldats français au Sahel en partenariat avec les membres du G5 du Sahel (Mauritanie, Mali, Burkina Faso, Niger et Tchad), s’inscrivait dans une politique de lutte contre les groupes djihadistes affiliés à al-Qaïda ou à l’Etat islamique présents dans la région. Cette mission s’étalant sur plus de 8 ans s’est terminée - non par la réalisation d’objectifs fixés en amont - mais par un départ précipité de la France du fait des contestations grandissantes notamment au Mali.
En effet, après deux coups d’Etat en moins d’un an au Mali, le pouvoir militaire en place ainsi qu’une partie de la population ne voit plus d’un très bon œil la présence française au Mali. Bien que le passé colonial de la France et le souvenir de la “françafrique” aient joué un rôle dans ce revirement de situation, des responsables français accusent les agissements d’une puissance extérieure sans vraiment la nommer : la Russie. Sur le terrain, les sondages réalisés démontrent que les personnes les plus proches du conflit et subissant les effets des groupuscules djihadistes sont les plus satisfaites de l’opération française tandis que la population plus au sud - moins en contact avec Barkhane - est la plus mécontente.
Les manifestations contre la présence militaire française, soutenues par les politiques maliens en place, dévoilent l’instrumentalisation du sentiment anti-français par les mouvements politiques. Ainsi, au fur et à mesure que la junte malienne se rapproche de la Russie, l’influence française décline jusqu’à la demande du retrait de son ambassadeur et de ses troupes. Elles laissent le champ libre aux troupes de la milice Wagner envoyées par le pouvoir russe.
Après le Mali, le Burkina Faso se rapproche également de Moscou et demande le renvoi des troupes françaises.
Au delà de la perte manifeste d’influence de la France au Sahel et de la politique de décrédibilisation menée à notre égard, ce sont une nouvelle fois les personnes les plus impactées - par le terrorisme et l’instabilité politique - qui souffrent le plus de ce revirement de situation. Les campagnes de manipulation russe visibles sur les réseaux-sociaux comme Twitter ou encore la création de l’ “Organisation africaine pour la russophonie” - instrument de lobbying russe -, confirment le pouvoir d’influence que peut jouer les grandes puissances étrangères dans un conflit jusqu’à faire passer un allié en tant qu’ennemi.
Stuart Benoliel
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