top of page

La France a-t-elle encore les moyens de sa puissance militaire ?






En 1939, l’armée française était surnommée “La reine des batailles”, plus puissante force terrestre mondiale. Aujourd’hui, elle est “échantillonnaire”. Ce déclin militaire fait de la France non plus une grande puissance, c’est-à-dire une nation dont le rayonnement politique, économique et militaire influence la direction du monde, mais une “puissance d’équilibre, au service de la paix et de la sécurité” selon Emmanuel Macron.

Alors comment expliquer que la France soit passée de “la reine des batailles” à une armée “échantillonnaire” ? Quel hardpower possède-t-elle pour prétendre peser à l’international ? 



Pour comprendre cette évolution, il faut remonter en 1945. La France sort affaiblie de la Seconde Guerre mondiale : la collaboration du Général Pétain avec l’Allemagne lui fait perdre sa place parmi les grandes puissances. Ce sont les Etats-Unis d’Amériques (EUA) et l’URSS qui tiennent alors l’ordre du monde. Le ralliement à l’une de ces deux nations (par l’OTAN ou le Pacte de Varsovie) s’impose à la plupart des nations. 

Pourtant, Charles de Gaulle décide de conserver l'indépendance de la France en misant sur sa grandeur, à savoir le fait d’être un pays à part, fort de ses principes et de ses révolutions historiques. Alors, pour que “la France soit la France” (27 avril 1965), le général la fait rayonner tant au niveau diplomatique que militaire : en plus de l’obtention d’un siège permanent au conseil de l’ONU, il dote la France de l’arme nucléaire, dont la Gerboise Bleue constitue le premier essai le 13 Février 1960. Suite à cette dotation, de Gaulle se libère de l’influence militaire américaine en renvoyant chez eux les 30 000 soldats présents sur le territoire français. La France est alors une grande puissance, notamment militaire.

Les successeurs du général continuent de s’atteler au rayonnement national les vingt années suivantes, mais la France peine à s’adapter à un monde changeant.  



En effet, durant les années 1990, ce sont les accords économiques entre pays qui fleurissent et prédominent : Mercosur en Amérique du Sud, Alena en Amérique du Nord, Asean en Asie du Sud. Or, la France persiste dans son domaine de pointe, le militaire, qu’elle spécialise. Ainsi, à la fin de la Guerre Froide, une politique de désinvestissement militaire est enclenchée. L’armée se spécialise donc dans les opérations extérieures (Opex), dites de stabilisation, mobilisant peu d’hommes, dont la fonction est de sécuriser des territoires. Sur la période 1990-2020, près de 200 opérations militaires sont orchestrées, contre 70 les trente années précédentes. La France intervient principalement en Afrique, notamment au Mali et en République Centrafricaine en 2013. Mais sa présence est vivement contestée par les autorités maliennes, forçant le retrait des forces armées françaises en 2022.

La France est de plus incapable de faire cavalier seul dans ses interventions militaires. En 2013, France et EUA décident d’attaquer la Syrie de Bachar al-Assad, accusée d’utiliser des armes chimiques contre la population. Au dernier moment, les EUA se rétractent, forçant la France à faire de même par manque de soutien et incapacité à assumer seule le conflit.

Le conflit actuel russo-ukrainien révèle également les failles de l’armée française. Selon le membre de la Commission de la Défense Nationale et des forces armées Jean-Louis Thiériot, elle est “échantillonnaire”. C’est-à-dire qu’elle peut intervenir dans tous les domaines, mais avec peu d’effectif et peu de masse. Michel Goya, ancien colonel des troupes de marines et historien spécialiste des conflits, dresse un bilan : "Au rythme actuel des pertes russes, l’armée de Terre française n’aurait plus aucun équipement majeur au bout de 40 jours". Suite au processus de désinvestissement militaire engagé dans les années 1990, la France n’est plus adaptée pour les conflits de longue durée et de haute intensité. 



Cependant, les crises terroristes et la menace de la guerre ukrainienne forcent le pays à réinvestir dans la défense militaire. C’est pourquoi, lors de ses vœux aux armées du 20 janvier 2023, le président de la République Emmanuel Macron exprime sa volonté de “renouveler [...] ce précieux outil militaire qui sert notre liberté, notre sécurité, notre prospérité et notre place dans le monde”. Il lance donc une loi de reprogrammation sur 6 ans (2024 - 2030), augmentant de 30% le budget des armées et accélérant l’investissement dans le militaire entamé en 2019. Ce budget servira à renforcer la dissuasion nucléaire (socle de l’armée française depuis les années 70), à améliorer la défense nationale, tant par la défense sol-air que la cybersécurité, et enfin à moderniser l’offensive par le développement de drones de combat. 

L’armée française peut également s’appuyer sur deux atouts majeurs. En mer premièrement, le France dispose de la deuxième plus grande ZEE et du porte-avion Charles de Gaulle, permettant de déployer des sous-marins nucléaires sur tout le globe. Dans les airs secondement, avec le Rafale, l’avion de chasse le plus performant au monde, qui connaît un franc succès : 285 modèles vendus ces six dernières années, dont une acquisition récente de 42 avions par l’Indonésie.

La France modernise et redynamise ainsi son armée pour répondre aux conflits contemporains et futurs, tout en s’appuyant sur ses forces de frappes actuelles.



Ainsi, la “reine de la guerre” de 1939 connaît un déclin post Seconde Guerre mondiale et tente de persister à la fin de la Guerre Froide, sans réellement réussir à s’adapter au monde changeant. Durant les vingt dernières années, ses interventions sont remises plusieurs fois en cause et ne peuvent se faire sans le soutien d’autres pays. Cependant, suite aux menaces terroristes et aux tensions internationales, la France réinvestit dans la défense nationale, pouvant compter sur la meilleure technologie aérienne mondiale et la plus puissante force militaire de l’Union Européenne.



Victor BONNEFOY





SOURCES 


Commentaires


bottom of page