Mardi 29 novembre 2022, à 20h en France, a eu lieu le dernier match de poule du groupe B de la coupe du monde au Qatar, entre les Etats-Unis d’Amérique et l’Iran. Un match qui a eu une importance capitale pour une éventuelle qualification des deux équipes, mais aussi pour les relations internationales entre les deux pays. Si les relations entre les deux pays restent très tendues encore aujourd’hui, l’histoire a montré que le football pouvait servir d’outil pour la paix. Retour sur le match du 21 juin 1998, entre ces deux mêmes pays avec un vainqueur inédit : la paix.
C’est en 1953 que les relations se tendent entre les deux pays. Les Américains, avec l’aide des Britanniques, renversent le 1er ministre iranien Mossadegh, dans le but d’installer un régime qui leur est favorable, afin de stopper la nationalisation du pétrole pratiqué par l’Iran. À la suite de cela, la démocratie Iranienne devient peu à peu une dictature violente et répressive. Mécontent de l’américanisation qui se développe en Iran, l’ayatollah Khomeini mène l’opposition lors de la révolution islamique, et crée la République Islamique d’Iran le 11 février 1979. Les relations diplomatiques entre les deux pays sont alors coupées, l’Iran est vu par les Américains comme un Etat voyou, et les Iraniens voient les Américains comme Satan. Cette crise diplomatique est encore accentuée par la crise des otages américains en Iran, où 39 américains restent en détention pendant 444 jours.
Les années suivantes, la crise ne fait que s’intensifier. L’attentat anti-américain de Khobar, le scandale Irangate (ou des hauts responsables américains ont été accusé de trafic d’armes vers l’Iran malgré un embargo imposé au pays), la destruction d’un airbus d’Iran Air par un croiseur Américain… autant d’évènements qui ne feront qu’assombrir les relations entre les deux pays. En 1997, Mohammad Khatami gagne l’élection présidentielle et appelle à un « dialogue des civilisations » avec les USA. Cet appel ouvre la voie à une amélioration des relations entre Américains et Iraniens.
C’est dans ce contexte tendu, mais en amélioration, que le hasard du tirage au sort de la coupe du monde 1998 place les deux équipes dans le même groupe. Cette coupe du monde est une grande fête en Iran, car c’est la première depuis 20 ans ! Le football était en effet vu par l’ancien régime comme assimilé à la culture dégradante importée d’Occident. Les Américains quant à eux, étaient les hôtes de la dernière coupe du monde en 1994, et après une belle performance à domicile, ils espèrent continuer sur leur lancée. Mais les deux équipes sont dans un groupe compliqué, avec l’Allemagne et la Yougoslavie. La qualification des deux équipes semble donc compliquée, mais l’enjeu est ailleurs, principalement pour les Iraniens. Le match le plus important à leurs yeux est celui qui les oppose à leur ennemi politique.
Les deux équipes perdent leur premier match et le match suivant opposant les deux équipes est déjà décisif ! L’équipe qui s’inclinera sera officiellement éliminée de la Coupe du Monde. Le tirage au sort désigne les États-Unis comme l’équipe « à domicile » et le protocole veut donc que les Iraniens se dirigent vers les Américains pour leur serrer la main. L’ayatollah Khamenei refuse. Les Américains acceptent alors d’échanger les rôles. Mais les problèmes ne s’arrêtent pas là : 7000 manifestants contre le régime Iranien sont attendus dans le stade. De plus, l’Iran menace de boycotter le match. La raison : M6 diffuse la veille du match le film « Jamais sans ma fille » qui raconte la vie d’une Américaine et de sa fille, séquestrées en Iran. Le film sera finalement diffusé et l’Iran acceptera de jouer le match.
Contrairement à ce qu’on aurait pu penser, le match est un symbole de paix. Lors du protocole d’avant match, les joueurs iraniens offrent à leurs adversaires des roses blanches, symbole de paix. Les joueurs américains posent ensuite ensemble pour la photo du match, avec respect et fraternité. Lors du match, bien que favoris, les Américains s’inclinent 2-1 contre leurs adversaires. Les Iraniens remportent leur première victoire en coupe du Monde, face à leur plus grand rival. A Téhéran, capitale de l’Iran, la joie est immense. Les gens dansent dans les rues, boivent de l’alcool, la fête est totale. Les officiels Iraniens félicitent la victoire de leurs joueurs. Du côté Américain, on espère que ce match aura permis de bâtir des liens entre les deux pays. Jeff Agoos, défenseur de l’équipe américaine a déclaré « Nous avons fait plus en 90 minutes, que les politiciens en 20 ans ».
Malgré ce résultat, l’Iran fut tout de même éliminé de la Coupe du Monde en perdant le dernier match contre l’Allemagne. Mais les deux équipes continuent leur travail pour la paix, en disputant deux ans plus tard un match amical sur le sol Américain. Malheureusement, des tensions sont depuis réapparues entre les deux pays… Le football pourra-t-il une nouvelle fois rapprocher les deux pays ? Rendez-vous le 29 novembre.
Par Lucas HOSTE
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